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La guitare

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Description

Guitare peinte.

… Des bruits pâles, des sensations nouvelles, des effleurements bruts… Je perçois, sens et hume. Une fraîcheur bourgeonnante me provoque quelques frissons de bonheur. Mais l’inconfort du sol qui se fourvoie me stimule vers une perte fantasmatique de réalité. Je respire et dé;pose délicatement mon corps léger et frêle sur mes pattes fragiles. Et je compte… Une, deux, trois, quatre, cinq, six…
D’accord… Six pattes. Doucement j’avance puis m’arrête, bercée par un son mélodieux et enivrant. Mais alors que je cesse ma parade fière de future coccinelle, la complainte disparaît de mon horizon auditif.
Je trottine et reprend mon chemin, et, de nouveau, l’air entraînant balance ses douces notes. J’accélère et cherche la direction de cet adorable ballade. Mais violemment, j’heurte une forme dure. Mes yeux
respirent le néant, l’obscur, le noir. Alors je m’applique, recule et tente de percevoir. Mais là, la rengaine habituellement si plaisante se transforme en une litanie déchirante. Elle me souffle
« Non, non, ne recule pas. Ne regarde jamais derrière toi. Avance… ».Tremblante et soumise, ma timidité hésite et meurt finalement dans les bras de la confiance. Sans image, mais guidée par un son harmonieux, parfois é;ploré, parfois rieur, je jubile. Je ne connais ni ces odeurs, ni ces bruits. Mais je me laisse transporter. Soudain, une voix caquetante et moqueuse passe près de moi.
Je frémis. Un vent désagréable batifole avec mes antennes.
- Il semblerait que la noirceur de tes yeux rime avec celle qui recouvre ta peau, petite larve! La vie n’est pas toujours juste avec tout le monde, hein?! Toi tu naît abandonnée et aveugle.
Et moi dans mes retards et mes sauts, je m’envole vers la vie dans un rideau blanchâtre.
Silencieuse, je m’immobilise. La voix rit de nouveau. Et elle continue son développement et son alignement de mots incompréhensible.
- Tu veux que je t’emmènes? Oh! Chut! Tu entends? La guitare!!! Elle joue pour toi! C’est le temps, le temps, le temps, le temps… les notes défilent comme les saisons! Viens! Laisse les
t’emporter un instant encore! Mais pas trop, il ne faut pas que tu grandisses trop vite!
- La…la guitare?

- Oui! Monte sur ses ailes! Elle t’emportera au-delà. Des notes, des notes, toujours des notes… La guitare est parfois farceuse, il ne faut pas toujours suivre sa mélodie, mais laisse là partager ta vie.
Accepte la. Ne la prends pas pour ennemie. Vas-y! Envole-toi! Apprivoise la!
Et, dans un éclatement de rire, je sens le sol se dérober. Les sons, les bruits sourds, les odeurs. Tout défile… Plus rien ne s’arrête. J’entends un éclair. Des forces liquides s’abattent sur
les notes de bois qui dérivent mais qui ne flanchent pas. Emportée par un tourbillon de sensations, tour à tour béates et moroses, j’apprivoise l’envol qui m’ai offert. Mais soudain,
je m’écrase brutalement. La douleur qui me transperce est fulgurante. Je me remet sur mes pattes péniblement. Quand une lueur traverse mes yeux. Eblouie, je ne vois que lui…

… Languissante sur une branche ensoleillée, je patiente. Irritée par les rires railleurs qui naissent de toute part autour de moi, j’inonde mon cœur de vents mélancoliques. Les peintures se succèdent. Blanc, noir, vert, jaune, rouge. Les tableaux se multiplient. Leur inconstance me ressemblent. Des voix envahissent le calme de mes métamorphoses vaines. Des cris, des pleurs, des rires… Elles plongent au milieu de mes rêveries comme échouées dans le vaste paysage de ma mémoire. Le regard éteint, lassé, outragé, je me ferme… Mais oui, je me ferme! Je sens mon enveloppe durcir allégrement. Je ris. Ris. Le soleil émerveillé m’adresse son plus beau rayon. Ma joie explosée, je respire et laisse l’air de la peinture former son cocon autour de ma peau si laide et si visqueuse. Fredonnant le refrain d’une nature capricieuse et généreuse, je remarque à peine le hibou aux yeux psychédéliques et au plumage arc en ciel qui me dévisage follement.
- Dis donc, j’ai perdu la toile de mon chemin. Pourriez-vous m’indiquer par quel détour je pourrais le récupérer?
- Euh…
- Vous ne savez pas? Seriez vous donc l’œuvre retardée d’un peintre temporairement hideux, bientôt céleste?
- En effet oui…
Le hibou me toise longuement. Le regard fou, il se déhanche amèrement. Puis lève ses ailes vers le ciel verdoyant.
- La beauté de ce monde est une ignominie face à l’inconstance du temps puisqu’elle semble être é;phémère…
S’envolant vers l’éther, m’abandonnant ainsi, perplexe, il délaisse sur le tronc la marque d’un sublime résolu et d’une sagesse nouvelle. Réflexion inconnue pour moi qui suis à l’aube d’une mutation. Mon ciel se voile peu à peu. Je souris puérilement. Protégé par le confort, j’oublie tonnerres, pluies, outrages et m’endort… Lorsque je me réveille, le soleil s’éclaire et sourit. Je repousse mes couvertures. Et é;panouit mon enveloppe. Je compte… Une, deux… Deux ailes! Le temps s’est coloré d’une teinte jaunâtre. J’ouvre mes yeux et mon envol. Lorsqu’une silhouette vermeil armée de points ébènes se colore devant moi. Illuminé, je ne vois qu’elle…

Cosette Larmignat
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iPhone
Aperture
F/2.8
Date Taken
Mar 28, 2009, 7:14:44 PM
© 2009 - 2024 RozennB
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